Mariage d’Elia et de Beatrice
8 octobre 2016, Diolo di Soragna
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Très chers Elia et Beatrice, chers frères et sœurs, chers tous,
La page d’évangile que nous venons d’entendre (Jn 15, 1-8) est celle du «rester-demeurer». Ces verbes ont une double signification: un sens objectif, ils rendent compte d’un fait, d’une réalité, et un sens subjectif, ils prescrivent un comportement.
Le fait. Par la force de la foi, du baptême et de l’eucharistie s’instaure une présence réciproque de Jésus dans son disciple et du disciple en Jésus. Par la sainteté des sacrements, Jésus enracine en lui ceux qui croient en lui, il donne aux siens la capacité de s’enraciner en lui. Comme nous l’avons entendu, Jésus et son disciple deviennent une seule réalité, comme la vigne et le sarment (Jn 15, 5). Ce fait admirable et mystérieux indique et suggère une expérience de stabilité: Jésus est le rocher. Jésus est la pierre, solide et résistante, contre laquelle viennent se briser les tempêtes de la vie, et s’apaisent les vents de nos années les plus tristes. Il est notre rocher, Il est notre pierre.
Et quand notre intelligence, notre volonté, en un mot notre coeur prend conscience de ce fait, de la réalité de notre demeure dans le Christ, que peut-il advenir subjectivement? Ce dont dans notre vie nous avons le plus besoin: advient l’espérance. Nous sommes greffés sur lui, enracinés en lui. C’est alors que nous pouvons dire comme saint Paul: «qui nous séparera de l’amour du Christ?» (Rm 8, 35) La prise de conscience que notre personne, notre être n’est pas privé de fondement provoque en nous comme un mouvement de gravitation vers le Seigneur. Vers lui va l’orientation fondamentale de notre vie, le dynamisme le plus profond de notre moi.
Cet évangile décrit la condition du chrétien, de tout chrétien: prêtre, époux, jeune, vieux. Mais ce même message trouvera tout à l’heure, par la célébration du sacrement de mariage, une réalisation qui ne regarde qu’Elia et Beatrice et ne se produit qu’en eux. Ce qui se produit en eux est explicité dans la seconde lecture. Et c’est tout simplement ceci: leur amour, qui d’ici peu deviendra amour conjugal, provient du sacrement enraciné, greffé dans l’amour, dans le lien qui unit le Christ et l’Église. Comme le sarment est enté sur la vigne, votre amour, chers Elia et Beatrice, appartient à partir d’aujourd’hui au mystère du Christ et de l’Église (Ep 5, 32). Et cette «référence» aussi, comme l’appelle Paul («Ce mystère est grand: je le dis en référence au Christ et à l’Église» [Ep 5, 32]), a d’une part un sens objectif, qui correspond à se qui se produit en Élie et Béatrice, mais elle a aussi un sens subjectif, qui indique quelle doit être, en toute cohérence, leur conduite.
À travers le consentement que vous échangerez d’ici peu le Christ, très chers Elia et Beatrice, produit un lien entre vous, en vertu duquel vous vous appartenez l’un à l’autre pour toujours. Il ne s’agit pas seulement d’une appartenance morale, selon laquelle les personnes honnêtes gardent la parole donnée. Il s’agit d’un lien de caractère sacramentel. Le lien du Christ et de l’Église est présent, demeure dans le lien qui vous unit et, réciproquement, le lien qui vous unit demeure dans le mystère du Christ et de l’Église.
Ce fait sacramentel a des conséquences pratiques. Il est chargé d’une forte portée subjective. Le Seigneur Jésus vous donne un commandement: «aimez-vous l’un l’autre» (Jn 13, 34). Et saint Paul précise: «maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Église et s’est donné lui-même pour elle» (Ep 5, 25), «femmes, soyez soumises à vos maris comme au Christ» (Ep 5, 22). En un mot, ce qui se passe entre le Christ et l’Église, vous devez le rendre présent dans votre vie quotidienne. Comment est-ce possible? Précisément parce que le sacrement que vous recevrez vous donne la capacité d’aimer comme le Christ.
De quelle nature est l’amour de Dieu qui se révèle dans le mode propre d’aimer de Jésus? Nous l’avons entendu dans la première lecture. C’est un amour absolument fidèle, pour toujours. «Dans un instant de colère, je t’avais un moment caché ma face, mais dans mon amour éternel j’ai eu compassion de toi» (Is 54, 8). Notez-le bien: la colère dure «un moment», l’amour au contraire est «éternel». Le pour toujours de Dieu rend possible le pour toujours de l’homme et de la femme. Dieu se fait homme non pas d’abord pour nous donner un exemple, mais pour nous donner la capacité du pour toujours.
Traduction Agnès Bastit
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